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Les innocents
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15 janvier 2006

Début

Chapitre second

 

Comme si une année entière était passée, quelque chose avait changé dans l’atmosphère du monde. Et pourtant la demeure de Dream ne variait pas, elle boudait le changement, tirait sa langue cimentée au temps, elle était déjà bien assez vielle ainsi.

Il pleuvait, assez pour s’en plaindre, sans pluie le monde serait bien silencieux.

Il pleuvait et le jeune homme marchait, son cerveau, plus vide que jamais, arrivait seulement à plaindre son mégot mouillé de ne pas lui laisser assez de mort pour arriver à la porte d’entrée.

Un sentiment de mal être l’envahi au simple contact de la sonnette ; une détestable impression d’être au mauvais endroit, de ne plus évoluer dans un monde lui appartenant.

Pour Dream, et pour bien d’autres se disait-il, il existe un principe de malaise dans le monde d’un autre, un assombrissement du ciel criant que la moindre incompréhension s’avère fatale dans la demeure d’autrui, la compréhension parfaite des lois sociales d’un univers dans lequel on souhaite se faire aimer est obligatoire et pourtant bien violente lorsque l’on pue la cigarette dans une maison de militants anti-tabac.

 

-Ding dong ding dung dang ding

 

Il imaginait les parents choisissant une sonnerie adapté en magasin, une pitoyable sonnerie composée de ding et de dung plutôt qu’un dring habituel, il imaginait la connerie humaine poussée à un point où la décision vitale de la sonnette serait l’importante discussion du soir, le kitshisme absolu poussant les patriarches à imposer à la visitée de manger en leur compagnie pour parler en famille des choses importantes de la vie… les sonneries.

 

La porte s’ouvrit, le malaise le reprit à la langue, détruisant toute réflexion pour le limiter aux simples courtoisies obligatoires.

Surtout ne pas faire d’erreur dès l’entrée.

La beauté du visage le troublait et c’est sur une bien incontrôlable voix qu’il se mit à parler.

 

-Bonsoir Sharon…

 

Merde, ma confiance en moi, mon contrôle, mon assurance, tout se barre à cause d’une porte et d’un visage.

 

Une porte vers le tartare venait de s’ouvrir, et sans un sourire, il serait parti en courant.

 

Un verre à la main, installé dans le canapé, ses yeux vides regardaient le sol alors que dans sa tête l’inhabilité dansait, la maladresse se faisait omniprésente.

 

-J’ai… enfin je…

Non, non

 

Il jeta l’invitation à la soirée masquée sur la table, il avait bien fait de l’amener. Durant sa lecture ses yeux se relevèrent, n’osant que contempler sans être aperçu, sa concentration se porta sur la nuque, blanche et frêle, sur laquelle il rêvait de…

-Je suis invitée ?

…passer les doigts, préparant la peau à l’approche de ses lèvres, mais il fut surpris par la lecture rapide de Sharon qui devait le regarder, perplexe, depuis un moment déjà.

Elle toussa.

-Oui

-Très bien

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